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Oui, le contraste est flagrant et parfois comique entre ces deux compagnons, l'un gros l'autre sec, l'un grand l'autre petit ; entre le vagabond et l'étudiant, le commis et l'aristocrate, l'ennemi et l'amoureux des livres, le plus abrupt de tous les missionnaires et le plus doux de tous les professeurs. Il n'en reste pas moins que le fait majeur qui domine le Moyen Âge fut qu'ils travaillèrent à la même œuvre, l'un par la pensée, l'autre dans les rues. Ils n'introduisaient rien de neuf dans le christianisme, au sens d'y glisser un relent de paganisme ou d'hérésie. Au contraire, ils rechristianisaient la chrétienté. Ils ramenèrent le christianisme malgré certaines tendances historiques pétrifiées par maintes écoles et autorités considérables de l'Église. Ils utilisèrent des instruments et des armes qui paraissaient à beaucoup paganisantes ou hérétiques. La nature fut pour saint François ce qu'Aristote fut pour saint Thomas. Certains estimaient qu'ils avaient recours à une divinité et un sage païens. Ce que tous deux firent en réalité constituent l'objet principal de ce livre. Il est bon de pouvoir comparer Thomas à un saint plus connu et moins intimidant car cela permet de considérer son œuvre de la façon la plus simple. Il paraîtra paradoxal, peut-être, de déclarer que ces deux saints nous ont délivrés d'un cauchemar effrayant, le pur spiritualisme. Il est à craindre que je sois mal compris si je professe que, par son amour des animaux, saint François nous a sauvés d'être bouddhistes et que, par son amour de la philosophie grecque, saint Thomas nous a protégés d'être platoniciens. Le mieux donc est de dire la vérité sous sa forme la plus simple : ces deux grands saints ont réaffirmé l'Incarnation et ramené Dieu sur terre. (fr) |