so:text
|
Peut-on s'en tenir à ce constat de la non-réception de l'œuvre de Michel Henry : non-réception par les philosophes qui renvoient l'œuvre à sa supposée dimension idéologique, et non-réception par cet autre public, subséquent (catholiques de droite ou d'extrême droite), censé se reconnaître dans l'œuvre ? Mais la situation est en réalité plus complexe, car les moins ouverts aux thèses de Michel Henry -- à ce qu'ils prennent pour les thèses de Michel Henry -- concèdent qu'ils sont impressionnés par sa "puissance" -- c'est là l'expression qui revient le plus fréquemment. La puissance est donc reconnue, reçue, à défaut de la thèse. Qu'est-ce alors que la puissance ? Quel affect accompagne ce mot ? Sans doute, au moins l'étonnement devant la constance d'une affirmation, qui d'un bout à l'autre de l'œuvre, d'un bout à l'autre des lectures que cette œuvre effectue pour se déployer, ne varie pas, déblayant tout sur son passage et produisant un effet sidérant. Un effet sidérant, qui cependant n’emporte pas la conviction, s'il provoque l’admiration, une certaine admiration : car on ne sait pas si l’on se trouve confronté à la violence d’une parole prophétique ou à une pure folie -- équivoque récurrente et indémêlable aussi bien quant à la prophétie que quant à la folie. En contrepartie de quoi le lecteur prudent ou pusillanime s'abstient de se prononcer et passe son chemin. (fr) |