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De même que dans mon corps, c'est ce même vouloir intérieurement vécu qui se traduit "en même temps" sous l'apparence de déplacements et de mouvements dans l'espace, de même je reconnais à l'œuvre, comme le principe de tous les mouvements que j'aperçois autour de moi dans la nature et pas seulement des miens, non pas leur cause qui n'est jamais qu'apparente, occasionnelle, dirait volontiers Schopenhauer, mais le même pouvoir obstiné qui œuvre en moi et me jette chaque jour à mes désirs et à mes besoins. Mon corps est pour moi, dans ma connaissance du monde, ce que la stèle de Rosette fut pour le déchiffrement des hiéroglyphes. Mon corps est une table sur laquelle sont gravés deux textes, l'un parfaitement intelligible et que je connais par cœur, l'autre obscur, encore composé de caractères étranges et de formes surprenantes, et dont le sens pourtant va m'apparaître brusquement. Car le sens de ces pieds et de ces mains, de ces ongles et de ces dents, de cette bouche vorace, de ce sexe et de cet œil, c'est ce que je sais depuis toujours, c'est ce que je suis, c'est le vouloir-vivre qui fuse à travers moi et auquel je m'abandonne. (fr) |