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Sur le chemin du retour, j'accentuai ma claudication. Elle se crut obligée de me proposer son aide. C'est extraordinaire la chaleur d'un corps quand autour de vous le monde se fait plus dur, revêche, menaçant. Je m'appuyais sur elle un peu plus qu'il ne fallait et je jouissais silencieusement de son embarras. Dès cet instant, j'avais compris ceci : plus je jouerais au blessé et au malade, plus rapidement elle se remettrait de sa dépression.La guérison, à vrai dire, fut foudroyante. Le matin, j'entendais Natacha fredonner dans la salle d'eau. La chanson ne s'interrompait que si elle se brossait les dents. Elle n'a plus revu sa psychanalyste, malgré les rappels de celle-ci, laquelle prétendait qu'il était extrêmement dangereux d'interrompre une analyse avant son achèvement. Achèvement qui, comme on le sait, n'a jamais lieu. Natacha s'amusait comme une folle. Ainsi fut clos le grand débat thérapeutique du XXe siècle, dans la rire de cette fille que je me suis mis à aimer quand j'ai compris qu'elle était la vie. (fr) |