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L'abstraction à laquelle procède la science est donc double. C'est d'abord l'abstraction qui définit le monde scientifique en tant que tel -- en tant qu'il met hors jeu dans l'être de la nature les qualités sensibles et les prédicats affectifs qui lui appartiennent a priori, pour ne retenir de lui que les formes susceptibles de se prêter à une détermination idéale. La non-prise en considération des caractères subjectifs de tout monde possible est indispensable du point de vue méthodologique dans la mesure où elle permet la définition de procédures permettant l'obtention de connaissances inaccessibles autrement, par exemple la mesure quantitative. Mais le développement d'ailleurs infini de ce savoir idéal ne se poursuit dans la légitimité que pour autant qu'il reste clairement conscient des limites de son champ de recherche, limites qu'il a lui-même tracées. Il ne peut lui échapper en effet que la mise à l'écart des propriétés sensibles et affectives du monde présuppose la mise à l'écart de la vie elle-même, c'est-à-dire de ce qui fait l'humanité de l'homme. C'est là la seconde abstraction à laquelle procède la science au sens que nous donnons aujourd'hui à ce mot : l'abstraction de la Vie, c'est-à-dire de ce qui seul importe vraiment. (fr) |