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Je finis par croiser un chemin de coupe qui se dirige dans la direction qui m'intéresse. Je ne me suis pas trompé. Il débouche sur la clairière où j'ai laissé la voiture. De nouveau, j'observe longuement, dissimulé dans un fourré, l'état des lieux. Toujours le même calme, le même silence. Je fais le tour de la clairière sans quitter mon abri -- au cas où ils seraient venus m'attendre ici. Enfin, je m'avance à découvert. J'examine la voiture. N'y aurait-il pas un petit engin dissimulé quelque part ? Toujours rien, si ce n'est une feuille de papier déployée sur le volant comme pour le protéger de la chaleur. Elle porte de grandes lettres écrites à la hâte au crayon feutre mais très lisibles : « Occupe-toi d'autre chose. Amicalement. ».Je conduis lentement au retour, comme si j'étais atteint moi-même par l'usure et la précarité de cette voiture. Bien que serrées sur le volant, mes mains tremblent. Je pense à ces parcours nocturnes, aux phares qui émergent au loin dans l'obscurité, approchent en épousant les détours de la route, avant de vous prendre soudain dans leur faisceau, illuminant, l'espace d'un instant, arbres, champs, maisons, jusqu'au chat surpris qui fuit sur le bas-côté.J'éprouve moi aussi ce sentiment de fête spirituelle qu'est une révélation :Jean Dutheuil, j'ai vu la face de tes assassins !-- Comme tu es pâle, s'exclame Natacha, comme tu es pâle ! (fr) |